Chambre 17: nouvelle venue [PV Mai][fini]

Selvi regarda la voiture de son père tourner au bout du chemin et s'enfoncer dans le port, vers l'intérieur des terres. Un vague sentiment de tristesse traversa son esprit, mais elle chassa ses larmes d'un geste de la main. Ce n'était pas le moment de pleurer. Elle se retourna et fit face au bateau qui devait l'amener vers son nouvel abri. Le capitaine la regardait d'un air mauvais, mais elle n'y prêta pas attention. Elle monta sur le navire et attendit. On jeta bientôt l'ancre et le voyage commença. Selvi regarda s'éloigner lentement le rivage, le port et la ville. Elle huma l'air marin et se mit à contempler les vagues qui venaient s'écraser avec douceur contre la coque du bateau. Des mouettes accompagnèrent le navire pendant une courte partie du voyage. Leur présence donna pourtant à la jeune fille une impression de calme. Elle n'était pas vraiment à l'aise sur l'eau. Ne sachant pas nager, elle estimait avoir le droit de ne pas vraiment l'apprécier. Selvi savait qu'elle allait dans une nouvelle école, mais penser qu'un trajet en bateau était nécessaire pour rejoindre l'établissement ne la rassurait pas. Après une ou deux heures de navigation, elle aperçut un rivage au loin. Elle remarqua vite que c'était une île et le bateau se dirigeait droit vers elle. La jeune fille compara alors sa nouvelle école à une sorte de prison paradisiaque. Coupé du monde extérieur, l'établissement ne devait pourtant pas déplaire à la plupart des élèves. Qui ne rêverait pas d'aller étudier sur une île? Un rictus s'afficha sur le visage de Selvi. Elle chassa très vite ces idées de sa tête et observa la terre se rapprocher. Le navire accosta et elle put descendre. Elle fit quelques pas vers l'intérieur de l'île, mais un immense portail lui barrait la route. Elle avança et il s'ouvrit de lui-même. Sitôt qu'elle l'eut franchi, les portes se refermèrent derrière elle. Selvi se retrouvait à présent comme prisonnière. Elle leva la tête et jeta un regard circulaire.

L'école était une série d'immenses bâtiments gris de plusieurs étages, dont on ne voyait pas grand-chose depuis le portail. Elle se fondait habilement dans le paysage, entourée par une grande forêt de pins d'un côté et, bien qu'on ne put le voir, de la plage de l'autre côté. De nombreux arbres parsemaient la pelouse du parc et un jardin s'étendait non loin de la sylve. Le bâtiment principal, et accessoirement celui le plus proche de l'entrée, était fait dans un style récent. On pouvait toutefois apercevoir des vestiges d'un passé trop souvent oublié. Sur la droite, on pouvait apercevoir le gymnase. Une des façades n'était qu'une simple vitre soutenue par des poutrelles d'acier, si bien qu'on pouvait voir les étudiants s'entraîner depuis l'extérieur. Le parc, quant à lui, était parsemé de bancs élégamment sculptés, de quelques fontaines, apportant une certaine fraîcheur les jours chauds et secs, et de nombreux buissons avaient été taillés dans diverses formes.

Selvi s'arracha à la contemplation de ce nouvel univers et avança d'un pas décidé vers le bâtiment principal. L'intérieur était froid et banal, dépourvu de décoration. Après tout, ce n'était qu'une école. La jeune fille se dirigea vers le secrétariat et s'annonça comme nouvelle élève. Elle dût remplir un questionnaire, puis reçut un plan de l'établissement, une chambre, son horaire de cours et d'autres informations tels que le règlement. Elle quitta rapidement la pièce, car la secrétaire la mettait mal à l'aise. Sans plus attendre, elle se dirigea vers sa chambre. Trouver l'endroit ne fut pas bien compliqué, car Selvi possédait un très bon sens de l'orientation.

La chambre numéro 17 se trouvait au deuxième étage. Elle y entra et s'arrêta net sur le seuil. La pièce était spacieuse. De grandes fenêtres, encadrées de magnifiques rideaux jaune-orange, permettaient à la lumière d'éclairer la chambre. Une atmosphère étrange, apaisante se dégageait de l'endroit. La pièce possédait trois lits simples. Des affaires parsemaient la pièce, par-ici et par là, signe que des gens vivaient déjà là. Sur un des lits, reposait une pile de vêtements et sur les deux autres des affaires personnelles aux deux autres occupantes. Selvi poussa un long soupire. Elle avait espéré être seule, mais elle aurait dû se douter de l'improbabilité de son idée. Elle devrait s'y faire. Elle n'était plus à la maison, seule dans sa chambre. Elle était dans un internat. Avançant vers la pile de vêtements, elle remarqua que le tas était en fait constitué de plusieurs exemplaires du même ensemble. La jeune fille posa son sac à dos sur le matelas et déplia l'uniforme. Ce dernier était constitué d'une simple chemise blanche, d'un polo sombre et d'une jupe. Selvi saisit les vêtements et les rangea dans l'armoire à un emplacement encore vide. Elle retourna vers son sac et étala le contenu sur son lit. Sa trousse de toilette fut posé sur sa table de nuit, ses sous-vêtements vinrent rejoindre son uniforme, le reste de ses possessions furent cacher dans le tiroir de la table de chevet et son vieux sac à dos alla prendre la poussière sous le lit. Selvi prit ensuite les divers papiers reçus plus tôt et ce mit à les feuilleter. Elle n'avait parcouru que quelques lignes lorsque que la porte s'ouvrit.

Furax, c'était le mot qui décrivait le mieux Mai en ce moment. La jeune collégienne âgée de 16ans parcourait les divers chemins de l'école d'un pas rapide et appuyé. Dans ses yeux, un feu étincelant faisait bien comprendre qu'il ne fallait absolument pas l'approcher. Pourquoi était-elle dans un tel état ? Vous le dire serait sans doute risqué... Mais, la situation était tellement comique que n'importe qui en rirait, or rire voulait dire vous déclarer la mort... Surtout si ça la concernait. Mais commençons par le commencement.

Samedi matin, aux environs de huit heures, une jeune fille se réveilla avec son habituel calme olympique, ou plutôt sa légendaire muraille de glace. Comme tous les jours, elle se dirigea en vitesse en direction de la salle de bain pour prendre sa douche. La demoiselle avait comme rictus de donner deux trois coups de brosse dans ses cheveux qui quoi qu'il arrivait restait parfaitement discipliné et magnifique à contempler. Bref, elle enfila un jean slim, une chemise à manche courte blanche et une paire de talon gris.
Enfin prête, elle se décida à quitter la salle de bain endroit que bizarrement elle aimait beaucoup. La collégienne dévala les escaliers qui la séparaient de la sortie du bâtiment avec une rapidité et une discrétion sans nom. Après son passage, un léger courant d’air faisait instantanément danser quelques mèches de vos cheveux et un parfum frais ressemblant étrangement à celui d’un matin de printemps venait chatouiller vos petites narines. Pas mal de personne se retournaient pour l’observer, mais souvent elle avait déjà disparu à l’autre bout du couloir laissant les curieux sur leur faim. En parlant de « faim », Mai se rendait justement à la cafétéria pour prendre son petit-déjeuner généralement composé d’un bon bol de céréales accompagné d’un jus d’orange fraîchement pressé.

Il était neuf heures lorsqu’elle franchit le seuil de la bâtisse encore très peu fréquentée à cette période de la journée. La plupart des élèves de Takuetsu No Gakuen aimaient faire la grasse matinée, pas Mai qui elle préférait utiliser son temps à des choses plus importantes à ses yeux. La demoiselle alla se servir et s’assit à une table près d’une fenêtre qui donnait la vue sur une cour intérieure. Elle avala son repas en pensant à des tas de choses sans grandes importances. Ses rêveries semblèrent s’éterniser. Ce n’est que lorsqu’elle constata l’arrivée massive d’élèves qu’elle jeta un coup d’œil à l’horloge qui indiquait maintenant onze heures et demie. La demoiselle quitta sa table et débarrassa ses services. Alors que la jeune fille s’apprêtait à quitter les lieux, elle entra malencontreusement en collision avec un garçon qui tenait une tasse de café brûlante à la main. Bien sûr, le liquide se déversa sur la magnifique chemise blanche de Mai qui ravala un cri de douleur au contact bouillant du café. Le pauvre garçon se confondit en excuse. La collégienne l’ignora royalement et partit sans dire un mot. Sa colère était telle qu’elle aurait pu l’envoyer valser à l’autre bout de la pièce, ce qui lui aurait pris tout au plus une fraction de seconde. Mais, elle arrivait quand même à contrôler ses nerfs, donc elle décida de rejoindre sagement sa chambre.

Furax, oui elle l’était. Ce que Mai détestait par-dessus tout c’était les imprévus de ce genre, ceux qui vous gâchent une partie de votre journée si bien organisée. La tâche de café s’étalait au niveau de son buste laissant entrevoir son soutien-gorge à dentelles rose. Etre pareillement mise en avant de la scène, ça elle ne le supportait pas non plus préférant l’anonymat à la popularité qui d’après elle vous portait plus de préjudices qu’autre chose.

Il ne lui fallut que quelques minutes pour entrer dans sa chambre, constater que par chance sa colocataire avait disparu de la circulation pour hurler un :

-Bordel ! Quel enfoiré ! Même pas cap de regarder où il va !

Tout en déversant son flot d’injures, elle ôta sa chemise en se rendant à la salle de bain. Elle la fit tremper dans l’eau en essayant de faire disparaître la tâche. Lorsqu’elle considéra que c’était suffisant, Mai pendit sa chemise pour la faire sécher. Elle en profita pour faire de même avec son soutien-gorge. Par la suite, elle passa pour la deuxième fois de la journée sous la douche. La demoiselle sortit de la pièce en boxer trop large pour elle et en soutif.
Lorsqu’elle passa le seuil de la porte de sa chambre, la collégienne vit une fille assise sur le troisième lit qui semblait lui appartenir dès à présent. Depuis quand était-elle plantée là ? Malgré la scène plutôt embarrassante, Mai garda son calme olympique et alla s’asseoir sur son propre lit juste en face de l’inconnue. Personne ne l’avait prévenue de l’arrivée d’une nouvelle : chose faite à présent. Elle ne la regarda pas tout de suite préférant chercher le débardeur le plus proche pour qu’elle puisse paraître un peu plus présentable. Ensuite, elle posa ses yeux sur la fille en face d’elle.

-T’es qui ?

Oui, Mai était d’une délicatesse sans précédent. Ca ne lui aurait même pas effleuré l’esprit de la saluer poliment avant tout interrogatoire. D’habitude, elle ne parlait pas aux gens, mais vu que cette personne allait cohabiter avec elle, la jeune fille voulait savoir à qui elle avait à faire. On ne savait jamais…

Lorsque que la porte s'ouvrit, Selvi ne bougea pas. C'était sûrement une de ses nouvelles colocataires qui venait chercher quelque chose. Une personne de plus qu'elle devrait côtoyer, une personne de plus à qui elle devrait mentir, une personne de plus qu'elle devrait ignorer. Elle ne trouva donc pas intéressant de quitter sa lecture. Cependant, elle sursauta quand la jeune fille cria.

-Bordel ! Quel enfoiré ! Même pas cap de regarder où il va !

De surprise, Selvi avait lâché ses feuilles qui étaient venues se poser sur le duvet. Mains toujours tendues devant elle, doigts fermés dans le vide, l'adolescente regardait avec de grands yeux la furie qui venait d'entrer. Elle n'osait pas bougé, comme stupéfiée par tant de colère et de rage. Elle n'avait jamais vu pareille fureur chez une personne. Certes des gens s'étaient énervés contre elle, mais ils abandonnaient alors bien vite devant son manque de réaction.

La jeune fille ôta sa chemise et se rendit dans la salle de bain, laissant Selvi seule dans la pièce. Elle ne semblait pas l'avoir remarquée. Reprenant ses esprits, l'adolescente saisit les feuilles qui jonchaient son lit et les posa sur sa table de chevet. Elle ouvrit le tiroir du meuble et sortit un stick pour les lèvres. Elle passa rapidement l'objet sur sa bouche, puis le rangea. Cette fille ne l'intéressait pas. Sa colère l'avait surprise, mais cela s'arrêtait là. Elle n'avait pas envie de parler, pas envie d'écouter, mais elle se doutait de la réaction de sa colocataire lorsqu'elle remarquerait sa présence. Sans doute déverserait-elle sur elle sa rage. Non, Selvi ne voulait pas jouer ce rôle.

Elle se leva, arrangea son duvet, saisit son coussin et le cala contre le mur. Ensuite, elle s'assit à nouveau sur son lit et posa son dos contre son coussin. Elle reprit en main les papiers qu'elle avait délaissés quelques minutes plus tôt et se remit à la lecture.

Chapitre 5: Comment sanctionne-t-on ?

Séchage de quelques cours : 2h
*Séchage de la totalité : 6h
*Dérangement du bon fonctionnement de la classe : ( arrivée tardive, dors en classe ect...) : 2h
*Note plus que médiocre (heure de colle pour rattraper le retard ) : 2 à 24h
*Insolence envers un membre du personnel : 4h
*Insolence multiple envers un membre du personnel : 6h
*Violence dans l'enceinte de l'établissement : 8h
*Dégradation du matériel : 10h
*Manquement au règlement interne ( couvre feu non respecter ect...) : 2h

C'était au moins clair. L'école ne laissait rien passer, heureusement que Selvi était une élève sans problème, trop peut-être. L'adolescente laissa son esprit vagabonder, elle ne revint à la réalité que lorsque la fille revint dans la chambre. C'est à ce moment-là qu'elle remarqua la présence de la nouvelle arrivée. Elle enfila rapidement un débardeur, puis se retourna vers Selvi qui ne daigna pas lever les yeux du règlement qu'elle tenait toujours en main.

-T’es qui ?

Aucune réaction, pas un battement de cils, Selvi resta de marbre. Elle avait entendu, mais n'avait aucune envie de parler. Elle fit donc comme si de rien n'était. Ses yeux parcourant les lignes où se suivaient les mots. La présence de l'autre adolescent l'empêchait néanmoins de se concentrer sur sa lecture. Elle fit donc semblant de lire, regardant les mots sans les comprendre. Il se passa ainsi quelques secondes, mais "la furie" devait être du genre impatiente, car sa réaction au manque de réaction de Selvi ne se fit pas attendre.

Pas de réponse... Pire encore, la jeune fille ne bougea pas un cils. On aurait dit qu'elle était pétrifiée sur place. Bizarre, c'était le mot pour décrire l'inconnue. Mai n'était vraiment pas d'humeur aujourd'hui, alors ça allait barder pour la nouvelle, vu qu'elle était nouvelle (vous avez suivis ?). La jeune fille s'étala sur son lit attendant tout de même une réponse.

Trois minutes s'écoulèrent. Ne tenant plus en place, Mai se releva.

-Hé ho ! T'es sourde ? Ou tu piges pas ma question ?

La voix de la jeune fille dégageait quelque chose de glacial, quelque chose que toutes personnes normalement constituées auraient fuis à la vitesse grand V. Pourtant la nouvelle resta toujours de marbre.

Mai soupira, se leva et alla ouvrir la fenêtre pour aérer cette espace bien trop petit pour trois personnes... Quoique l'inconnue ne prendrait sûrement pas trop de place.

* Après on dit que je suis zarbe... *

Pensa-t-elle. Mai jeta un bref coup d'oeil à la vue qu'offrait la fenêtre. Le ciel était dégagé et malgré tout des nuages noirs s'amassaient à l'horizon. Un violent orage d'automne allait frapper à Takuetsu No Gakuen. La collégienne aimait le tonnerre, les éclairs. Elle trouvait presque ce spectacle reposant.

Mai respira profondément avant de se retourner pour fixer l'inconnue. Son visage était fin, ses yeux verts et elles possédaient de longs cheveux bruns coupé en dégradé. Rien de particulier à signaler à son sujet, à part qu'elle était muette comme une carpe. Mai secoua sa tête et alla se planter devant la nouvelle. Même si sa colère l'avait quelque peu abandonnée, la collégienne ne supportait pas quand on l'ignorait. Alors, ce fut d'un coup sec, mais très bien millimétré qu'elle arracha les feuilles que la nouvelle tenait soigneusement dans ses mains.

-Je veux juste une réponse. Après je te fous la paix...

C'était un bon deal, non ?

-Hé ho ! T'es sourde ? Ou tu piges pas ma question ?

Selvi ne broncha toujours pas. La voix de sa colocataire avait pris une teinte glaciale, mais cela ne l'effrayait pas. Elle sentit même poindre un sentiment étrange, de l'amusement. Normalement, les gens fuyaient devant son manque de réaction, même l'adolescente abandonna. Elle se dirigea vers la fenêtre qu'elle ouvrit. Selvi laissa paraître un sourire, mais l'effaça aussitôt. Elle avait gagné, elle pourrait profiter du calme et de la paix. Profitant du silence, elle se replongea dans sa lecture, si bien qu'elle ne remarqua pas les mouvements de sa colocataire. Lorsqu'elle lui arracha les feuilles des mains, Selvi sursauta et envoya à son interlocutrice un regard assassin. Elle s'apprêtait à lui envoyer une remarque cinglante, mais l'adolescente la devança.

-Je veux juste une réponse. Après je te fous la paix...

Selvi ferma les yeux. Pourquoi fallait-il toujours parler et user sa salive pour ne rien dire. Elle soupira. Cette conversation allait quand même être importante, puisqu'elle devait se présenter. Or, c'était la moindre des politesses que de dire à la personne avec qui on va vivre toute sa scolarité qui on était. La politesse ne devait pas être le fort de la fille qui se tenait en face d'elle. Ajouté à ça la mauvaise journée qu'elle passait, la réponse ne pouvait être que sèche.

"Je ne parle qu'aux gens civilisés."

Selvi marqua une courte pause, assez longue pour que l'information arrive au cerveau de son interlocutrice, mais trop courte pour qu'elle puisse y répondre quelque chose.

"Mais comme je n'ai pas du tout envie de parler, je vais te répondre. Je m'appelle Selvi Okada. Maintenant, laisse-moi."

D'un geste vif, elle reprit ses feuilles et se remit à « lire » le règlement pour la n-ième fois. La jeune fille ne prêtait pas attention aux personnes qui l'entouraient d'habitude. Mais même si elle s'était renfermée, si elle n'osait parler aux gens de peur qu'on découvre son secret, elle avait gardé bien enfui en elle des souvenirs de l'époque d'avant. Elle ne se permettait pas d'y penser, mais parfois, elle réagissait par réflexe. Et le réflexe qu'elle avait à ce moment-là était de guetter la réaction de l'adolescente. Elle était discrète et continuait à lire ses feuilles, mais elle prêtait attention au moindre mouvement dans son champ de vision.

La fille ne répondit pas immédiatement. Elle ferma tout d'abord les yeux avant de soupirer ce qui agaça d'autant plus Mai qui prenait ce signe pour de l'irrespect.

"Je ne parle qu'aux gens civilisés."

Le ton sec que la nouvelle venait d'utiliser ne faisait que raviver la colère de Mai qui n'avait qu'une envie, lui foutre une paire de claque. Pour qui se prenait-elle ? Mai ne bougea pas d'un millimètre. Elle respira profondément, mais au moment où elle allait répliquer quelque chose, l'inconnue la devança :

"Mais comme je n'ai pas du tout envie de parler, je vais te répondre. Je m'appelle Selvi Okada. Maintenant, laisse-moi."

Sans se démonter, la prénommée Selvi récupéra ses feuilles et fit mine de lire. C'en était trop pour la collégienne. Ce n'était vraiment pas sa journée. D'habitude ce genre de comportement la laissait froide comme du marbre, mais là c'était carrément de la provocation de la part de son interlocutrice.

D'un coup vif et violent, elle arracha pour la deuxième fois les feuilles de la jeune fille pour mieux les jeter parterre. Puis, elle empoigna Selvi pour la plaquer contre le mur peint en blanc.

-Si tu veux un conseille, ma petite, fais gaffe à comment tu parles aux gens dans cette école...

Attaqua Mai d'un ton encore plus glacial qu'auparavant. Son regard était devenu dur, dur comme de la glace. Elle regarda fixement Selvi pendant une dizaine de secondes, puis elle relâcha son étreinte avant de tourner les talons pour se diriger vers la sortie. La demoiselle ouvrit la porte, mais avant de la franchir, elle lança un dernier regard menaçant à la nouvelle tout en ajoutant :

-Ou tu risques de le regretter amèrement...

Mai referma la porte derrière elle, toujours bercée par cette fureur qu'elle avait eu de la peine à contrôler cette fois-ci. Elle pouvait être impulsive, mais elle perdait rarement le contrôle, pas aujourd'hui pourtant... La collégienne n'y avait pas été de mains morte, mais cette mise en garde n'était que la pure vérité. Si Selvi tenait à la vie, il valait mieux pour elle qu'elle montre un peu plus d'audace et de respect aux personnes environnantes...

La réaction ne se fit pas attendre. L'adolescente priva à nouveau Selvi de ses feuilles, puis l'empoignant, elle l'a plaqua contre le mur. La jeune fille retint un cri et se força au calme. Elle sentait son cœur battre la chamade et eut peur qu'il n'explose. Les paroles de sa colocataire se firent glaciale et menaçante.

-tu veux un conseille, ma petite, fais gaffe à comment tu parles aux gens dans cette école...

Son regard aussi avait changé. Il était devenu dur, très dur. Selvi sentit ses poils se hérisser. Elle fut contrainte de regarder ailleurs, ne supportant plus le regard de l'adolescente. Quelques secondes s'étaient écoulées et elle la relâcha, puis elle tourna les talons et se dirigea vers la porte. Selvi suivit sa colocataire du regard et sursauta lorsque cette dernière se retourna.

-Ou tu risques de le regretter amèrement...

Selvi sursauta à nouveau lorsque la furie claqua la porte. Elle frissonna à nouveau. Quelques secondes s'écoulèrent sans qu'elle ne bouge, mais soudain, elle sentit sa tête tourner. Elle se rendit compte alors qu'elle avait arrêté de respirer. La jeune fille prit une grande bouffée d'air et s'assura avec soin de réguler sa respiration. Elle ferma les yeux et se força au calme.

Jamais elle n'avait vu pareille colère. Personne encore n'avait osé user de violence physique à son égard. Les mots avaient souvent fusé, mais cela n'avait jamais dépassé ce stade. L'adolescente se rendit alors compte de ce à quoi elle avait échappé jusqu'à maintenant. Faire preuve d'ironie n'était pas toujours une bonne option. Elle se méfierait à présent et promis, qu'on ne l'y reprendrait plus.

Selvi quitta son lit, ramassa ses feuilles et les rangea. Elle alla ensuite dans la salle de bain et se lava le visage. Sa relation avec sa colocataire allait être tendue et elle avait compris qu'elle devrait se tenir à carreau. La jeune fille allait devoir user de toute sa science pour l'éviter et, dû moins, entrer le moins de fois possible en contact avec elle.

L'adolescente décida de prendre une douche pour se changer les idées. Il n'y avait rien de mieux pour réfléchir et évacuer la peur qu'elle avait ressentie. Après réflexion, elle se demanda si elle aurait vraiment été capable d'aller plus loin. Selvi en doutait, car elle se trouvait dans un établissement scolaire, pourtant une phrase résonnait à son oreille « Si tu veux un conseille, ma petite, fais gaffe à comment tu parles aux gens dans cette école... »...

Elle secoua la tête et décida d'oublier cet événement.